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La Seine-Maritime à fond dans la gestion adaptative

Chaque département possède sa fédération de chasse, mais celle-ci reste unique dans sa politique et gestion de la biodiversité. Eric COQUARIX est le directeur de la FDC de Seine-Maritime, véritable passionné, il nous partage, dans une interview, la situation du petit dans ce département. Plus précisément celle de la perdrix, oiseau emblématique de la Seine-Maritime. Action de protection, d’aménagement et innovation dans les comptages, la FDC76 peut être considérée comme pilier de la gestion adaptative.

Chasse, territoires et particularités

Grégoire PORTE : « Eric COQUATRIX, de façon générale, comment se porte la chasse dans votre département de Seine-Maritime ?« 

Eric COQUATRIX : « Aujourd’hui, au niveau des chasseurs, nous sommes à environ 12 000. Ce nombre est relativement stable depuis 5 ans. De plus, comme beaucoup de départements, nous avons une augmentation assez net du nombre de candidats à l’examen du permis de chasser (500 candidats par an).

La première particularité de notre département c’est que nous avons que des chasses privées à part les forêts domaniales. En gros nous avons à peu près 100 000 hectares de bois, dont moitié privé, moitié domaniale. Nous avons aussi une partie chasse sur le domaine maritime public, l’estuaire de la Seine. Quelques communales dans la Vallée de Seine. Mais sinon tout le reste du territoire est en chasse privée, qui sont, elles, de petite superficie. Cela représente environ 6 000 territoires différents.

La seconde particularité de notre département c’est la gestion administrative de toute la faune sauvage. En effet, le fait d’avoir beaucoup de chasses privées engendre un gros volume de demandes à traiter. Nous sommes sur un département riche d’un point de vue gibier, nous avons aussi bien du grand gibier, que du migrateur et du sédentaire. »

Le petit gibier, un axe majeur

GP : « Le petit gibier est-il toujours une priorité pour votre fédération ? »

EQ : « Depuis le premier SDGC, datant de 2004, nous avons beaucoup travaillé sur la gestion du petit gibier. Avant cet outil, nous n’avions pas de moyen de gestion, de ce fait, les prélèvements sur le lièvre ou la perdrix étaient trop importants. La première phase a été de mieux organiser la chasse. On a donc monté des GIC. Aujourd’hui nous avons donc 53 GIC, qui représentent à peu près la moitié de la surface chassable du département. Donc en gros, le message a été «si on veut gérer la perdrix le lièvre le faisan, il faut créer des structures de gestion commune».

Depuis 2004 nous avons donc un plan de chasse lièvre. On ne peut pas le chasser si la demande n’est pas faite. Nous avons en parallèle sur les deux tiers du département un plan de gestion perdrix, qui comme le lièvre, nécessite une demande, si on veut la chasser avec une attribution en fonction des comptages effectués. Pour le faisan en revanche nous avons commencé beaucoup plus tard. Aujourd’hui, on est en un plan de gestion sur la moitié du territoire. Il y a donc des quotas de prélèvements, avec des territoires où il y a interdiction totale de tirer la poule. Et sur le reste du territoire il s’agit simplement d’un plan de gestion avec interdiction de tirer la poule. Le faisan se développe très bien, le lièvre, on arrive à garder des populations stables. 15/20 individus aux 100ha.

En revanche pour la perdrix, on se rend compte que c’est de plus en plus compliqué. Car l’habitat se dégrade, mais on ne comprend pas certaines choses. Par exemple cette année, les conditions météo étaient très favorables, mais la reproduction a été moyenne, voire médiocre. Et nous n’avons pas d’éléments de réponse face à ça. »

GP : « Face aux difficultés rencontrées par les populations de perdrix, quelles actions avez-vous mises en place ? »

EC : « On a mis en place un plan de soutien petit gibier, où la FDC investit 100 000 euros chaque année pour permettre le financement des opérations de repeuplement pour le faisan. Pour la perdrix nous menons des opérations de renforcement des populations, à partir de souches sauvages, car on a créé un collectif perdrix avec d’autres FDC. On récupère ainsi les nids où le couple reproducteur a été tué par un engin agricole ou un prédateur. Les œufs sont mis en couveuse chez un éleveur et on utilise ainsi ces oiseaux, pour créer des oiseaux de souche sauvage (F1 ; F2 ; F3). Ensuite nous pratiquons l’adoption, on identifie les couples sauvages sans jeunes et on fait adopter ces compagnies de souche sauvage. Malheureusement, malgré une très bonne gestion, nous avons une reproduction très moyenne, sans motif d’explication. »

GP : « Pour connaître l’évolution des populations, procédez-vous à des opérations de comptages ? »

EC : « Depuis des dizaines d’années maintenant nous faisons des comptages et des suivis sur la perdrix. De ce fait, on effectue chaque année des échantillonnages sur le département, afin d’obtenir un indice moyen de reproduction à une échelle locale. En mars, au printemps, nous faisons des comptages par battue à blanc. On a donc des informations sur le niveau des effectifs reproducteurs, ainsi que de la reproduction. Par la suite on définit le niveau d’attribution aux 100 ha par secteur de gestion. »

GP : « Afin d’être plus efficace, dans vos opérations de comptages, vous avez utilisez un nouvel outil cette année ? »

EC : « En termes d’échantillonnage, le choix qu’on a fait pour gagner du temps cette année, c’est d’utiliser la nouvelle application SIRENE.TECH. On a donc développé un protocole à partir de cette application pour qu’à la fois le personnel technique et les bénévoles, qui sont formés, puissent identifier les compagnies observées et les géolocaliser. Cela permet également de donner des informations sur le contenu de la compagnie. Il faut remplir l’enquête sur SIRENE.TECH, ce qui permet d’avoir tous les jours, l’information détaillée sur le contenu de la reproduction dans le département et localiser secteur par secteur. Cet outil nous a donc permis de récolter les informations de manière simple et efficace.

Le département est donc complétement précurseur dans la gestion adaptative des espèces. »

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Partenaires et avenir cynégétique

GP : « Quels sont les acteurs qui vous accompagnent dans ces projets ? »

EC : « Autre chose novatrice. Dans le cadre du nouveau SDGC, nous sommes tellement contestés aujourd’hui que j’ai pu proposer à nos élus qu’on inclut dans notre SDGC, un Plan départemental en faveur de la biodiversité et de la lutte contre le dérèglement climatique. C’est-à-dire, que nous sommes en train de co-construire avec les acteurs locaux et départementaux un plan biodiversité, pour montrer que les chasseurs sont très impliqués dans la préservation de la nature. »

GP : « Quel est l’avenir du petit gibier en Seine-Maritime ? »

EC : « Notre département est aujourd’hui très technique. Notre premier SDGC nous a permis de mettre en place la gestion adaptative. Pour continuer de chasser, il faut avoir des populations de gibier qui nous le permettent. Aujourd’hui nous sommes un département où les lâchers sont très rares. Nous gérons quasiment, que des populations sauvages. Donc pour avoir des populations sauvages il faut avoir un territoire de qualité. Nous devons également montrer que nous sommes des protecteurs de la biodiversité. Ainsi, pour que la chasse perdure, il faut s’inscrire dans la gestion adaptative et dans la protection de la biodiversité. »

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